Keep Dancing Inc : Interview

La musique de Keep Dancing Inc est faite de guitares électriques, de synthés et de boîtes à rythmes. Le groupe était initialement composé de Charles et Louis, deux étudiants. Joseph les a rejoint en cours de route et à eux trois ils forment désormais l’entreprise qui fait danser, entendant imposer le Cold Zouk à tout l’univers. Rencontre avec Charles et Joseph.

 

Keep Dancing Inc : Interview
© Mag Hardy – De gauche à droite : Joseph – Charles

 

Pouvez-vous revenir sur la formation du groupe, le moment où vous vous êtes lancés ?

Charles : Louis et moi nous nous sommes rencontrés grâce à un ami commun, à un concert des Palma Violets. On a bu des bières ensemble et on a bien pogoté, c’était cool. Pas longtemps après il m’a envoyé un message en me disant genre ‘Mec, tu veux qu’on fasse un groupe ?’. Je me disais  ‘Cool !’. Je le trouvais trop cool mais j’osais pas lui demander parce qu’il avait déjà un groupe. Puis nous avons commencé à bosser ensemble, enregistré deux EP et fait des concerts. Nous connaissions vaguement Joseph, que l’on avait croisé à un concert de Flavien Berger.

Joseph : Moi je jouais dans un groupe, mais je commençais à en avoir un peu marre et j’étais à la recherche de gens pour faire de la musique. J’ai rencontré Charles et je lui ai envoyé un message pour savoir si je pouvais faire de la musique avec lui, mais sans penser à Keep Dancing Inc, car je ne savais pas qu’ils cherchaient des gens.
Finalement il m’a dit qu’il cherchait des gens donc je suis allé chez lui et on a joué. Ca s’est bien passé donc ça s’est fait tout seul.

Charles : Le lendemain on a rejoué ensemble.

 

Vous avez toujours su que vous auriez besoin d’autres membres ?

Charles : A la base quand on a eu l’idée du groupe nous voulions être six : Louis et moi à la guitare et au chant, quelqu’un au clavier, à la basse, à la batterie et quelqu’un aux percussions. Mais notre première proposition de concert c’est Flavien Berger qui nous l’a faite. On l’avait rencontré une fois en backstage à un concert de Kindness et il nous avait dit qu’il aimait notre démo. Il nous a dit ‘Faites un concert dans un mois, je viendrais et ça serait cool qu’on fasse des trucs ensemble’. On a donc eu un mois pour préparer un concert et on n’avait pas le temps de trouver ces personnes là. Louis avait une boite à rythme et un synthé et on a commencé pour la première fois à brancher des trucs en midi et à faire de la programmation sur ordinateur. On a eu un mois pour préparer toutes les chansons et puis on a fait un concert dans un troquet minuscule de Pigalle où l’on va tout le temps. Flavien Berger est venu et c’est à ce moment que tout a vraiment commencé.

 

Comment ça se passe pour la composition ? Vous travaillez tout ensemble ?

Charles : C’est assez variable. Ça dépend vraiment des morceaux. La plupart du temps je compose des accords et une partie de chant chez moi, et ensuite je viens en studio avec ça et chacun trouve ses parties et on réarrange le truc entièrement ensemble, on trouve les sons ensembles. Mais sur certains morceaux je me base sur des trucs que Louis a composé et ensuite je construis une chanson autour de ça. La plupart du temps c’est moi qui m’occupe des paroles, même si souvent il y a des corrections que l’on fait tous ensemble. Avec Joseph on n’a pas eu le temps de faire trop de morceaux en composition, mais ces morceaux vont arriver très bientôt.

 

Vous avez récemment signé chez Un Plan Simple et vous avez annoncé un EP, en ressortant deux anciens titres réarrangés. Est-ce que vous pouvez en parler ?

Joseph : L’EP est sorti sur internet, il y a deux morceaux, c’est un single. On va le sortir en vinyle, en 45 tours, mais on attend d’avoir la pochette définitive pour le presser. Pour le CD par contre on ne sait pas encore, on n’en a pas parlé, peut-être pour la promo.

 

La pochette c’est vous qui l’avez faite ?

Charles : Nous avons fait toutes les anciennes pochettes, et pour celle là on a une pochette temporaire, que l’on a mis sur Soundcloud. C’est une photo prise par Clara notre manager, et j’ai marqué ‘Keep Dancing Inc’ avec Paint (rires). Mais pour le prochain EP on bosse avec une de nos potes, Gabrielle, qui sera d’ailleurs notre future batteuse. On a déjà fait quelques répètes avec elle et ça se passe trop bien mais malheureusement elle est à Penninghen… Donc c’est compliqué pour la musique mais très bien pour la pochette. Elle bosse là-dessus ; on va essayer de faire un truc cool avec pleins de photos jetables, mais on laisse planer le mystère.

 

Vous travaillez sur des nouveaux morceaux ?

Charles : Oui on a pas mal de nouveaux morceaux, mais notre gros souci c’est le temps. On a beaucoup de compositions ; Louis compose à peu près un nouveau morceau par semaine et ils sont trop beaux. Joseph a aussi beaucoup de chansons en réserve, et moi aussi. Je pense que si on arrivait à enregistrer tout ce qu’on avait en tête pour l’instant on en serait à 30 titres.

Joseph : Oui, je pense.

Charles : Mais entre les répètes que l’on doit faire pour les concerts, le temps que l’on doit passer à la fac … On n’a pas le temps de tous les enregistrer. Cet été on va vachement bosser là-dessus pour en enregistrer un maximum. On va aussi développer notre méthodologie d’enregistrement pour enregistrer plus vite et avec des moyens parfois plus réduits mais plus efficaces. On a pleins de nouveaux morceaux mais on manque de temps pour les concrétiser.

 

Pourquoi avoir décidé de réarranger les morceaux du  nouvel EP ?

Joseph : On trouvait que les anciens enregistrements n’étaient pas assez propre, et que le message artistique était pas bien délivré à cause de problèmes techniques. Le fait de les avoir réenregistrés, réarrangés, fait qu’ils sont plus écoutables ; ils rendent pro à la première écoute et sonnent mieux. J’ai aussi apporté quelques arrangements. Dans l’ensemble, c’est cool et on en est fiers. Comme Charles disait on n’a pas beaucoup de temps, donc on a préféré faire des réarrangements et des réenregistrements d’anciens morceaux, plutôt que de partir complètement sur des nouveaux morceaux. Ça aurait mis plus de temps. Là on a mis un mois, voir plus pour le faire, car on est se prenait la tête, on est très perfectionnistes.

Charles : Un moment on s’est perdu (rires). On avait terminé Alright, et elle faisait 6 ou  7 minutes. On s’est dit qu’on était allé trop loin. L’ancienne version rassemblait à une espèce de blockbuster américain, genre super propre. On l’a réduit en se disant que ça ne nous ressemblait pas, et qu’il fallait faire quelque chose de plus simple sans se prendre la tête.

Joseph : Donc on a recommencé, et ca a pris deux fois plus de temps (rires). C’est ça d’être perfectionniste.

 

Qu’est-ce que vous allez faire de vos anciens EP, vous comptez les ressortir ?

Joseph : Ils sont sur Bandcamp maintenant.

Charles : On les a laissés sur Bandcamp parce que nos fans de la première heure les aiment trop.
On n’a pas envie de les enlever parce que on sait qu’il y a des gens qui les aiment beaucoup, et nous aussi d’ailleurs. C’est en téléchargement libre donc tout le monde peut les choper gratuitement, et si quelqu’un a trop de sous dans son portefeuille il peut nous les donner. Pour l’instant on ne laisse sur soundcloud que le nouvel EP, pour concentrer un peu les écoutes et mettre en valeur les travaux les plus récents.

Joseph : On a gagné 73 centimes grâce à Bandcamp, on est super contents.

Charles : Ca nous fait trois Dragibus maintenant.

 

Keep Dancing Inc : Interview
© Mag Hardy – De gauche à droite : Louis – Joseph – Charles

 

Est-ce qu’on peut revenir sur vos influences musicales ? Personnellement, je vois plein de choses ; Depeche Mode, King Krule, ou Only Real et Devonte Hynes pour les instrus …

Joseph : Charles est très content là ! (rires) Je pense que pour les influences, tout ce que tu as dit c’est déjà un bon début. Après je pense qu’on écoute tout les trois des trucs différents, mais en même temps on a des artistes communs. Par exemple je sais que Louis adore les Chromatics, moi aussi.

Charles : Oui moi aussi. Il y a Joy Division aussi.

Joseph : Joy Division, et New Order surtout, beaucoup.

Charles : Au niveau du son et de l’enregistrement, les Drums. Au début on n’y pensait pas trop, mais plus ça allait et plus on s’est rendu compte que c’était une grosse influence. Pas forcément tant au niveau de la composition mais vraiment de l’enregistrement. Finalement ils font des trucs très simples mais qui sont très beaux. Plus le temps passe, et plus l’on se dit que c’est une référence majeure finalement.

 

C’est quoi le Cold Zouk ? Votre recette pour continuer de faire danser les gens ?

Charles : En quelque sorte ouais. Cold Zouk, c’est né au moment où on terminait d’enregistrer le tout premier Ep. Il devait être deux heures du mat, on était tout content, et au moment d’exporter les fichiers on devait mettre un nom de genre.
Les groupes émergents au début ont tous l’impression de faire un truc super innovant, qui ne peut pas se rattacher à quelque chose de connu. Plus personne ne se dit : ‘Je fais du rock’ ou ‘je fais de la pop’, parce que non, ça ne résume pas assez. Chacun essaie d’inventer son propre nom.
Au début, tout le monde est un peu pompeux et pense qu’il est en train de révolutionner la musique.
Aujourd’hui tout le monde parle de ‘cold wave’ ou de trucs assez arty comme ça. La cold wave c’est clairement une influence, donc on s’est dit ‘on garde le cold, parce que c’est cool, ça fait arty et tout, mais on va mettre ajouter un truc clairement pas snob, et beaucoup plus cool en fait’. Le zouk ça nous semblait bien parce que c’est considéré pour beaucoup comme une musique clairement ringarde et de mauvais gout. Sauf que le mauvais gout ça n’existe pas.
Le mauvais goût c’est la distinction de Bourdieu. C’est juste les gens aisés qui inventent ça pour se mettre de côté. Nous on a pas envie de ça et on mélange des trucs un peu snobs et arty parfois, on en a conscience, mais avec des trucs clairement populaires, on s’en fout et on est clairement contents comme ça.
On est contre cette idée de distinction et on ne veut pas être snob, même si à la base on a une culture un peu snob.

Joseph : Cold ça veut dire froid, et le zouk c’est chaud, donc c’est tiède.

 

En même temps c’est aussi difficile de se caler dans un genre musical aujourd’hui.

Charles : C’est vrai. Je trouve ça assez dommage car depuis dix ans, il y a un genre qui a émergé au niveau du rock qu’on appelle ‘indie rock’, et qui véhicule clairement une musique. Toutes les influences du début : King Krule, Devonte Hynes … et d’autres groupes, c’est de l’indie rock, mais ce que je trouve trop triste c’est que le terme a été vraiment mal trouvé. L’indie rock ça veut rien dire dans le sens où c’est censé être sur des labels indépendants. Mais il y a pleins de groupes qui ne sont pas sur des labels indépendants. On s’est servi juste du terme de label pour qualifier cette musique alors que clairement, on pouvait regrouper tous ces groupes ensembles. Ce terme est vraiment un peu nul parce que ça veut rien dire. Du coup on ne peut pas trop se proclamer de l’indie rock même si en soi on en fait. Il faut se voir dans une globalité, et on est un peu dans cette globalité là. Mais on ne peut pas trop en même temps s’en revendiquer parce que ce n’est pas la meilleure globalité du monde.

Joseph : Le cold zouk c’est aussi un peu un fuck a tout ça aussi, aux appellations. C’est vraiment, ‘Nous on fait du cold zouk, et c’est ça’.

Charles : Au moment où l’on a créé le cold zouk, il y a un mec que je n’arrêtais pas de croiser à des concerts qui voulait lancer son groupe de rock. Il était ultra pompeux, et sa musique était… Je n’aime pas critiquer la musique des gens, mais elle n’était pas fameuse. Sur sa carte de visite il avait marqué ‘Dark indie rock’.  Cold zouk c’était un peu pour dire ‘Nous on ne fait pas du dark indie rock mais du cold zouk’.
Voilà, en fait le cold zouk c’est l’opposé du dark indie rock.

 

Quand est ce que vous avez commencé à jouer sur scène ? Comment vous vous sentez en live ?

Charles : Notre premier live, je m’en souviens bien, c’était le 10 mars de l’année dernière. Entre mars et juin on a fait 6 ou 7 concerts, et a repris en septembre. Le 27 novembre on a fait notre premier live avec joseph, une date-clé.
Depuis qu’on bosse avec Joseph les live sont beaucoup plus agréables. Déjà le son a pris un niveau supérieur et fait beaucoup plus danser les gens, ce qui était un peu le but dès le départ (rires).
En plus de ça on divise les responsabilités en trois, donc il y a une bonne énergie.
Depuis qu’on a commencé à jouer avec Joseph il n’y a pas eu de mauvais concerts. Parfois il y avait des concerts où le public était content mais à la fin nous on était là ‘Mais est ce que l’on a fait assez bien ? Le son était pas top …’ Et depuis que nous bossons ensemble tout se passe bien niveau concerts.

Joseph : Merci Charles (rires).

Charles : Par exemple, au Pop Up c’était très cool [NDLR : le 23 mars]. Les gens ont dansés… A partir de là c’est génial.

Joseph : C’était le premier crowd surfing, un moment historique.

Charles : Et le premier pogo : un 9/10, car il n’y a pas eu de jambes cassées à la fin !

 

Le top 3 de Keep Dancing Inc?

Joseph: Moi j’ai découvert un nouveau groupe, Grand Soleil, signé sur Pain Surprises. Ils sont deux et un de leurs morceaux ressemble vachement aux Chromatics justement. Ca ressemble aussi un peu aux Daft Punk.
Ils ont beaucoup d’instruments sur scène et ils sont trop forts. Ecoutez ça, écoutez Grand Soleil.

Charles : Moi récemment, mon gros coup de cœur, et je soûle tout le monde avec ça, c’est Porches, un groupe de New York mené par Aaron Maines. C’est leur deuxième album. Le premier était assez cool, mais je n’arrivais pas à comprendre le truc extraordinaire autour de ça. En fait le deuxième est magnifique. J’ai rarement écouté un album aussi beau, et je pense que ça va rentrer dans mes influences au même titre que King Krule ou Devonte Hynes, ou Kindness, parce que je suis aussi très très fan de lui. Cet album est brillant, il s’appelle Pool. Il y a du DX7, mon synthé de cœur, et on l’entend tout le temps. Il l’a fait avec Frankie Cosmos, qui est aussi une autre artiste que j’aime beaucoup. C’est un très bon album et il va passer au Point Éphémère en mai.

Joseph : Venez le voir avec  nous.

Charles : Venez le voir et boire des bières avec nous !

Joseph : Et Louis il écoute beaucoup Paradis en ce moment. Ils viennent de sortir un morceau, Toi et Moi, qui est excellent. Ils vont bientôt sortir leur premier album donc on l’attend avec impatience, parce que l’on adore ce groupe.

Charles : Il écoute aussi beaucoup un groupe de RnB qui s’appelle King, qui est chouette.

 

Keep Dancing Inc : Interview
© Mag Hardy – De gauche à droite : Louis – Joseph – Charles

 

Keep Dancing Inc sera au Midi Festival de Hyères le 24 juillet.
En attendant, vous pourrez les retrouver à Paris les :

– 16 Avril (14h00) : Place Saint Marthe / Disquaire Day
– 12 Mai : Point Ephémère
– 21 Mai : Le Pop-Up du Label