La comète Realo

Comète : Astre d’aspect nébuleux souvent accompagné d’une traînée lumineuse.

Je cherchais un titre accrocheur et qui allait faire sérieux, mais après réflexion je pense que c’est finalement une très belle allégorie – et surtout très juste – pour parler de Realo et de sa jeune carrière, à la seule différence que la comète Realo ne va pas repartir vers les tréfonds de l’infini pour ne réapparaître que dans 76 ans (cc Halley) mais je pense bien que celle-ci va nous faire un bel impact, Don’t look up style. 

Avant de se lancer dans un article qui contient beaucoup trop de métaphores autour de l’espace, un peu de contexte. Realo est un compositeur, réalisateur et rappeur français originaire du Sud-Ouest de la France. Il est également membre du trio de beatmaking EX3 (Yunodji et Idée Noire).

 

Un aspect nébuleux

À la première écoute, il faut rester accroché. À la deuxième, plus du tout. Il faut plutôt tout lâcher et se laisser guider par ce qu’on entend. Des refrains entraînant, des sonorités nouvelles, déstructurées, poussées à l’extrême, néanmoins maîtrisées, toujours avec comme point d’honneur une certaine harmonie et de la justesse. Realo nous plonge dans une brume indescriptible mais délicieusement enivrante jusqu’aux paroles, presque inintelligibles, qui deviennent le dernier instrument de sa mélodie. Realo essaye, produit, pose et publie. Il n’y a pas vraiment de fil conducteur, plutôt beaucoup de détermination.

Et en effet, notre comète a déjà laissé pas mal de traces dans le paysage underground français. Fier représentant de ce qu’on appelait il y a encore quelques années le Soundcloud Rap, Realo est très productif : plus de 40 de titres sortis en format singles, 4 EP’s, 1 projet avec une foule d’invités. Et sûrement quelques dizaines de titres sur qui traînent sur Soundcloud qui ne finiront jamais sur Spotify.

Nébuleux donc. Mais d’aspect seulement.

Quand on se penche sur tout ce qui se fait depuis plusieurs mois, plusieurs années dans la scène underground française, on comprend d’où viennent les titres de Realo. Ambiances hyperpop, drum & bass revisitée, sonorités digitales, saturées, distordues, avec peu de paroles et des mélodies planantes, sur un fond de lo-fi. L’underground joue avec les codes, étire les limites de la musique, pour en découvrir des recoins cachés encore inconnus. Realo catalyse tout cela et en fait sa marque de fabrique.

Il est la résultante d’une génération hyper-connectée, hyper-prolifique, inspirée pendant des années par un rap cantonné à une certaine app au nuage, jugé inaudible pour le grand public, qui est aujourd’hui sur le point de remonter aux premiers rangs.

D’aspect seulement, donc.

 

 

Et cette traînée lumineuse alors ?

Realo sème ses graines, non seulement par la quantité de tentatives qu’il laisse derrière lui, mais aussi et surtout par la qualité des titres qu’il propose dont certains donnent sûrement de nouvelles idées à certains rappeurs. Cette traînée, il la sème, mais surtout, elle l’entoure. En fait, Realo sait s’entourer. Il est dans la vague et dans la bonne ; que ce soit avec ses proches du début (Yunodji, Recklessboise), ou avec des nouvelles têtes qui ont dû le rejoindre en cours de route (Khali, Azur), il sait attirer le talent autour de lui pour créer des synergies toujours plus intéressantes, plus pertinentes.

Realo d’ailleurs est rarement seul sur ces titres, comme l’attestent ses 2 titres qui ont le plus fonctionné à ce jour sur Spotify IRIDESCENCE (Khali, Yuri Online, Yunodji) et C ma shit pt. 2 (co-produit avec Simala, Abel31, Recklessboise). Il aime faire les choses en équipe, jamais dans le même ordre.

Passe-passes, co-productions, co-réalisations, … c’est toujours une surprise d’écouter un de ses nouveaux titres. Et peu importe le terme technique utilisé pour décrire ses nombreuses collaborations, il en est toujours leur point commun.

Dans cette lumière qui l’entoure, on retrouve aussi tous ces artistes qui matérialisent avec précision l’univers nébuleux de Realo, en récréant des univers visuels fidèles à ses titres :

 

© Romain Pisa

 

On retrouve cette sensation de flou, d’abstrait, mais surtout cette envie de tenter et d’essayer des choses. Ces créations complètent bien l’œuvre de Realo, elles sont pertinentes et modernes à l’image des artistes qui les réalisent : Adrien Delmas (2 SEC) et Romain Pisa (IRIDESCENCE) pour ne citer qu’eux.

L’image est devenue plus qu’importante aujourd’hui et Realo l’a bien compris : 3D, recherches graphiques sur les matières, les structures, les ambiances, … De nouvelles portes ouvertes, enfoncées, avec des artistes pertinents, qui montent et qui créeront les images fortes de demain.

 

Enfin, sans oublier cette sensation d’engouement autour du jeune rappeur, sensation qui se lit notamment grâce à Twitter, où l’on ressent une communauté grandissante et toujours plus valeureuse. Il y a des tweets et citations qui ne trompent pas. Cette effervescence 2.0 entretient la hype autour de Realo, l’attente autour de tous ses nouveaux titres mais surtout l’impression qu’il va marquer quelque chose. Que de plaisir !

Voilà donc beaucoup de métaphores autour de l’espace, sûrement pas assez d’objectivité mais un constat assez puissant : Realo est moderne. C’est un gars de son époque, multi-facettes, doué, indépendant, déterminé et talentueux. Il a sûrement commencé par tout faire lui-même dans sa chambre, s’essayer à tout, grandir et progresser grâce à Internet. Il en connaît les codes, le langage. Il est de cette génération qui va chercher ce qu’elle veut, qui se rassemble pour arriver à ses fins et qui fait pas mal d’étincelles au passage.

 

© Uraonvision

 

Si l’année 2021 marque un tournant dans sa jeune carrière d’artiste, catégorisé underground, 2022 sera pour lui la division supérieure. Et comme entrée en matière le titre 2 SEC, une collaboration bluffante avec le bien connu Myth Syzer, qui encore une fois a le secret de revenir et de taper juste, pour nous mettre en appétit pour la suite. Affaire à suivre.