La Chica : La pop mystique qui guérit

Est-ce que toi aussi tu es expert.e en ARN messager ? Non ? Ça tombe bien car moi non plus. À l’heure où la médecine consiste à donner son avis le plus scientifique sur les vaccins des multinationales éponymes, je vous propose un instant de répit, un moyen peut-être pas de se vacciner contre le COVID, mais de se reconnecter à l’essentiel, assurément un moyen de soigner bien d’autres maux : la musique guérisseuse de La Chica.

 

La Chica : La pop mystique qui guérit

 

Ingénieure du son et claviériste de formation, ex-membre du groupe de pop expérimentale 3somesisters, depuis 2017, La Chica est une artiste indépendante au multiculturalisme assumé, une poète aux influences pluridimensionnelles.
Une enfance parisienne dans le quartier de Belleville, des influences musicales éclectiques qui vont de la pop des Beatles aux compositions de Debussy, une recherche autour des traditions liées à ses origines vénézuéliennes, La Chica s’empare de tout cela et en ressort une pop multiculturelle aux teintes toujours renouvelées et aux accents quasi-mystiques.

En 2015, alors membre du groupe 3somesisters, Sophie Fustec publie son premier morceau solo clipé, Oasis. Dès 2017, elle prend son envol et débute une nouvelle carrière, étape marquée par la sortie de son premier EP, du titre éponyme, Oasis. À l’occasion de cette renaissance artistique, « La Chica », « fille » en espagnol, surnom donné par un de ses oncles, devient son nom de scène, celui d’une artiste qui n’a de cesse depuis de transmettre ses états d’âme en tant que femme franco-vénézuélienne, mais aussi en tant qu’être sensible aux pensées abstraites, proche de ses émotions et de la nature qui l’entoure. Pour ce faire elle ne fait aucun compromis, c’est ainsi que sur ce premier opus se mêlent l’anglais et l’espagnol sur des sonorités qui vont de la pop-électro contemporaine à d’autres sonorités bien plus proches de la cumbia (genre musical né au XVIIème siècle en Colombie et repris par les amérindiens des Antilles) ou du doo-wop (sous-genre du rythm and blues).

Lauréate en 2018 du tremplin national FAIR, La Chica commence à trouver sa place sur la scène pop-indé se démarquant notamment par ce côté latino et hispanophone peu commun en France.

 

 

Dès 2019, La Chica entame la suite de son projet et sort son premier album, Cambio. Comme l’indique cet intitulé et le titre introductif Hay Algo, cette fois La Chica cherche à comprendre le monde, à s’éveiller de sorte à mieux appréhender ce qui se cache derrière ses illusions, et donc d’une certaine manière elle change. Un changement au niveau des sujets qu’elle aborde notamment. D’une poésie flirtant avec l’abstraction dans son premier EP, là on y retrouve des titres (Hay Algo, Sola) évoquant la frustration qu’elle ressent de ne rien pouvoir faire face à la situation Vénézuélienne embrasée et surtout au fait de ne pouvoir y aller comme elle l’a fait pendant des années pour rendre visite à sa famille.

Quel que soit le thème qu’elle aborde, visuellement aussi La Chica est toujours éclatante d’énergie et bouillonnante de sa magie. En 2015 déjà le clip d’Oasis met en avant cet attrait pour le psychédélique avec un visage se muant en un imbroglio difforme, attrait psychédélique qui se poursuit en 2017 avec le clip de Be Able un détournement chirurgical de visuels publicitaires des années 80. Autre attrait de la Chica : la danse. Ce « besoin de ressentir physiquement pour assimiler », arrive plus tard sur les clips notamment de Sola, mais s’épanouit véritablement sur le clip de Ratas où des parties chorégraphiques effrénées se mêlent à la transe, aux visuels psychédéliques ou encore sur The Sea où dessins animés et danse vont de paire. Et, dernièrement c’est avec deux clips forts qu’elle révèle de nouveau sa personnalité artistique, La Loba et Agua, deux titres extraits de son dernier « mini album », La Loba.

 

La Chica : La pop mystique qui guérit

 

Le 4 décembre 2020, après des mois de confinement successifs, c’est dans un album de neuf titres que La Chica révèle toute la mélancolie, et aussi la fureur qui coule alors dans son âme. Seule, subissant l’annonce récente de la mort de son frère, au moment de la composition de La Loba, La Chica souhaite avant tout répondre au mal qui la ronge, faire un album hommage à son frère (présent à sa gauche sur le visuel de l’album), un moyen de faire le deuil d’un être cher. Pour cela, elle revient à son essentiel, le piano. Inspirée par les solos de piano de Chilly Gonzales aussi bien que par les rites chamaniques que sa grand-mère lui a fait découvrir, c’est ainsi que Sophie Fustec fait s’entrecroiser des chants apaisés et épurés aux paroles brèves et souvent répétitives qui apparaissent parfois comme des mantras. Pour illustrer cette élévation, Agua, d’autant plus accompagné de son récent clip, ressort naturellement de ce projet. Une nouvelle fois, c’est de l’élément fétiche de l’artiste dont il est question : l’eau. Laissant le courant tout emporter, peine, et tristesse, La Chica se laisse faire par « l’eau qui soigne », celle-là même qui d’après le clip guérit au point de colorer la vision, et qui permet d’entrer dans l’état de transe si cher à l’artiste. Et comme si cet apaisement n’était qu’un mirage éphémère, c’est la rage de la Loba qui succède à ce titre.

 

 

À plusieurs reprises en interview, La Chica clame son engagement féministe et, comme son frère avant elle, LGBTQ+. Cette parole militante qu’elle tient à partager, c’est certainement par La Loba qu’elle la transmet. Morceau presque rap qui fait la part belle aux contrastes, La Loba, qui est aussi le titre éponyme de l’album, raconte l’histoire de La Loba, une vieille femme mise en marge de la société qui chante pour redonner vie aux corps éteints. De l’aveu-même de La Chica, ce titre entre en résonnance avec le combat féministe, celui des femmes que les hommes ont voulu briser pour en faire taire la force. Et quand le chant de rage, de la Loba se termine c’est Drink, l’ode aux morts déjà présente sur le dernier album, que La Chica nous propose dans une version bien plus mélancolique que l’originale, plus calme aussi. Ensuite, comme si son chant ne parvenait pas seul à exprimer son émotion, La Chica nous invite à ce solo de piano, Interlude, comme une dernière expression de la pureté nécessaire pour accompagner son frère. Enfin Hoy, un chant cristallin retentit ; en résonance à La Loba peut-être, mais aussi certainement comme la dernière déclaration d’amour à son frère dont elle s’est promis de poursuivre le combat en faveur des communautés LGBTQ.

Voilà comme s’achève La Loba. Indubitablement plus sombre que ses projets précédents, cet album confirme néanmoins la singularité et l’habilité de La Chica à mêler sonorités et poésies, échos mystiques et percussions. Une artiste qu’on espère voir au plus vite en concert physique. En attendant, retrouvez sur france.tv</i son live capté en mars dernier à la Seine Musicale, vous ne serez pas déçu.e.s.