EXEK : Biased Advice

Depuis une petite décennie, l’Australie est devenue une place forte pour une flopée de nouveaux groupes se revendiquant punk, ou post-punk. Avec des groupes comme King Gizzard, Amyl and the Sniffers, Tropical Fuck Storm, ou encore les Chats, le pays nous fournit une belle brochette de groupes à l’aura international.
Mais comme dans toutes les scènes musicales, il y a ceux sur qui l’attention se porte, et ceux, qui sont malheureusement mis de côté par le grand public.

 

EXEK, Biased Advice

 

C’est le cas avec le groupe de Melbourne EXEK, et de leur premier album Biased Advice. Avant de devenir un groupe complet en 2014, EXEK était seulement le projet un peu flou d’Albert Wolski. Avec des chansons déjà écrites, il ne lui manquait que les musiciens pour l’accompagner et traduire sa musique sur scène. C’est donc en 2014 que Wolski trouve ses futurs musiciens, Andrew Brocchi au synthé, Sam Dixon à la batterie, Nell Grant au sax, et Henry Wilson à la basse. Avec un groupe désormais au complet, va suivre deux années de concerts dans toute l’Australie, et plus particulièrement à Melbourne, un EP (comprenant les chansons de la face A de Biased Advice), et un split avec le groupe américain Spray Paint. Programme chargé donc pour EXEK, qui va prendre le temps d’enregistrer leurs premier album en 2016.

Biased Advice est le premier LP du groupe, et ce qu’il faut dire est qu’il constitue une vraie surprise, surtout quand on lit la façon dont il est décrit par le label et les distributeurs : « post-kraut-dub-psyche-punk ». Longue description qui, dans la plupart des cas, serait annonciatrice d’un fouillis stylistique, ou encore d’une propension à se voir un peu trop beau pour un groupe qui débute à peine dans le milieu. Mais avec un peu de curiosité et d’écoute, on peut se dire que ce descriptif un peu pompeux qualifie parfaitement cet album. 

 

EXEK : Biased Advice
Pochette de l’album ‘Biased Advice’ d’EXEK.

 

Tout au long de Biased Advice, les influences sautent aux yeux (ou plutôt aux oreilles). This Heat, Jah Wobble et PIL, les groupes allemands comme Can, Faust, ou même Cluster par moment. Le premier titre Submitted est parfait pour illustrer les influences du groupe. Il s’ouvre par une phase électronique très krautrock, et qui laisse la place au bout de quelques instants à ce mélange de genres. Une basse que le grand Jah Wobble aurait très bien pu composer, une batterie métronome et précise, et des arrangements qui viennent tourbillonner autour de la partie rythmique, avec des guitares stridentes, et la voix d’Albert Wolski, plaintive, qui surplombe l’ensemble et apporte cette touche plus psyché. Rebelote sur le deuxième titre A Hedonist, avec encore une fois la basse d’Henry Wilson qui guide le morceau, accompagnée par la batterie de Sam Dixon, qui rappelle celle de Jaki Liebezeit de Can. Titre plus incisif, qui est suivi de Foreign Lesions, ce dernier prenant une direction un peu plus calme mais qui garde toujours les mêmes marqueurs du style hybride de EXEK.

 

 

L’album continue avec Replicate, titre qui vient terminer en beauté la première face. Replicate, tout en gardant une rythmique kraut-dub, accentue l’influence de PIL et de This Heat, et montre une nouvelle fois, et peut être de manière plus évidente, l’agilité avec laquelle le groupe mélange les genres et les influences, tout en imposant une vraie identité.
Enfin, Biased Advice s’achève sur Baby Giant Squid, long de 16 minutes et des poussières, et peut être le meilleur titre de l’album. Cette fois, au-delà de l’approche musicale, ce qui marque le plus est la beauté et le calme de cette chanson, la seule qui ne figurait pas sur leur premier EP.  Les percussions et les dissonances s’accumulent, mais sont enveloppées par un clavier d’apparence simple, mais beau, et qui transforme ce titre en petit bijou qu’on pourrait presque qualifier, à partir de la 6ème minute, de morceau d’ambient. 

Si les albums suivants du groupe ne sont pas du même acabit, ce premier essai est le genre d’album qui mériterait presque de devenir une de ces œuvres cultes, dont on pourrait parler dans quelques années encore. Et si vous n’êtes pas convaincu, le mythique label Castle Face, tenu par le grand John Dwyer, vient de le rééditer il y a quelques mois. Raison de plus pour y jeter une oreille.