Biche : Interview

Hardies est parti à la rencontre d’Alexis, membre fondateur du groupe Biche, guitariste et chanteur. Il nous a parlé de son parcours mais surtout de l’aventure Biche. Alexis aime concevoir dans un environnement verdoyant afin de booster sa créativité et le mot d’ordre du groupe est “Passer son temps à ne rien faire, mais bien le faire”.

 

Biche : Interview

 

Est-ce que tu peux me raconter les origines du groupe ?

La création du groupe remonte à 2012, il a eu pas mal de formes différentes. D’abord il y a eu deux membres avec qui on est restés trois mois environ, et puis les autres nous on rejoint un peu plus tard. Biche s’est vraiment formé en 2016 lorsque notre premier single est sorti. Initialement, sortir un album n’était pas l’objectif. On répétait beaucoup, on arrangeait des morceaux pour les versions lives, etc. Ce qui nous importait c’était de faire des concerts, de les faire évoluer et de pouvoir jouer ensemble. On produit nous-même nos morceaux et on voulait vraiment expérimenter des choses en prenant notre temps.

J’ai trouvé les premières expériences de studios un peu dures, on n’avait pas encore nos repères, c’est un peu effrayant. 

 

Vous avez toujours fait de la musique  ?

Oui, bien sûr, tout le monde étaient musiciens avant. Moi par exemple, j’ai eu ma première batterie à 2 ans (rires). 

 

Pourquoi “Biche” ?

Pour une multitude de raisons, sans vraiment savoir pourquoi non plus. On l’a pris comme ça, c’est presque un truc un peu dada en fait ! 

 

Qu’est-ce que le titre de votre premier album La nuit des Perséides signifie ? 

J’avais déjà commencé à bosser sur l’album trois ou quatre mois avant, et j’avais besoin d’avoir un cadre pour pouvoir situer l’histoire. Ce premier album c’est des petits tableaux pour chaque chanson et comme c’était très onirique, il fallait vraiment trouver quelque chose qui allait englober tous les morceaux. L’été de cette même année, j’ai assisté à une pluie d’étoiles filantes, la nuit des Perséides justement. Je me suis dit « et si l’album se passait sur une nuit ; la nuit des Perséides ». Je me suis rendu compte que cette nuit-là allait donner un fil conducteur à tout l’album. Le début représente la fin de journée et la fin, le début de la journée qui suit. L’idée c’est vraiment de l’écouter d’une traite d’ailleurs !

 

Quel titre as-tu préféré composer ? 

Très honnêtement, j’ai préféré Discipline, le dernier titre qu’on a sorti en 2020. Et je préfère ce que je suis en train de faire actuellement. En fait, je n’ai pas un rapport hyper attaché à mes morceaux, même si j’y ai passé du temps, j’ai une préférence pour la création nouvelle. Plus j’avance, plus je suis content de ce que je fais, plus je préfère les morceaux et plus je prends plaisir à les composer.

 

 

Quand préfères-tu écrire ? Le jour ou la nuit ? 

Ça dépend vraiment du mood à l’instant présent et du type de morceau que je veux écrire. 

 

J’ai beaucoup aimé L’Essor, est-ce que tu peux m’en dire plus ? Me raconter comment il a été créé ?

Plutôt facilement en fait, je savais que je prenais du temps pour faire cet album, il me manquait deux morceaux pour avoir la durée qu’on souhaitait. Donc, L’Essor c’était un peu une histoire de la deadline en fait (rires). C’était intéressant de créer un morceau si rapidement par rapport aux autres, qui ont demandé plus de temps. L’Essor c’est un morceau avec beaucoup de légèreté, et au final je me rends compte que c’est souvent le morceau que les gens préfèrent. Je pense qu’il a été écrit plus simplement, peut-être que les gens se retrouvent plus dedans aussi. 

 

On entend dans vos morceaux des influences à la fois très 60’s mais également super actuelles, tu peux m’en dire plus sur vos influences respectives ?

L’influence principale c’est clair que c’est les Beatles, on est très années 60. Nous sommes allés chercher tous leurs instruments. On tend vraiment vers cette musique-là, qui s’est présentée naturellement parce que c’est ce qu’on écoute tous. D’un côté plus jazz, on écoutait pas mal Mild High Club, qui est plus actuel, tout ça s’est mélangé. Il y a eu beaucoup d’influences mais on a essayé de mixer tout ça pour faire quelque chose d’assez homogène, qui sonne 60s, c’est un peu l’étiquette de Biche ! 

 

Un futur projet à l’horizon ?

Pour le moment, on est un peu contraint avec le confinement mais bien sûr. On a surtout hâte de se retrouver pour jouer ensemble. Un prochain album est en préparation, j’ai pour l’instant trouvé le cadre et la thématique à aborder : j’adorerais qu’il soit un peu plus ancré dans son époque, qu’il prenne en considération le monde d’aujourd’hui, et ce qui va se passer à l’avenir. Ce n’est pas un album d’anticipation mais j’aimerais bien le “conscientiser” un peu plus que le premier. Après on va bosser à notre rythme, je ne sais pas quand on le sortira, mais une chose est sûre, il ne sortira pas tant que je ne l’estimerai pas prêt. 

 

Comment avez-vous géré les deux périodes de confinement ? Vous avez pu continuer à créer ? 

Le confinement n’a vraiment pas été une période propice à la création me concernant. Je crois que j’ai du mal à écrire quand le monde ne tourne pas autour de moi. Après pour être honnête, ça n’a pas beaucoup changé mon style de vie car je ne suis pas un adepte de l’agitation urbaine (rires).

Par contre la crise sanitaire qui en est à l’origine, la crise sociale qui en découle, toutes ces tensions, cette immobilisation générale me donne envie de parler d’un million de choses. J’essaye de le faire mais paradoxalement ça me coupe pas mal dans ma productivité alors que j’ai du temps.  En plus de tout ça, on ne peut pas se voir avec le groupe donc c’est compliqué. 

J’écris toujours seul normalement mais pour le prochain album je voulais davantage inclure le reste du groupe dans l’élaboration et l’arrangement des morceaux. J’ai donc fait des démos de mon côté depuis le début de l’année sans vraiment savoir quand on pourrait se retrouver. Mais là c’est cool en janvier on va s’enfermer une semaine au studio. 

Par exemple, au début du premier confinement j’ai essayé de tenir un rythme pendant 15 jours: “Un jour, un morceau”. Mais c’est bien compliqué d’avoir de la rigueur quand la vie est chamboulée à ce point je trouve. Et puis quand j’ai essayé de tenir ce rythme, la vision que j’avais de mes textes changeait au fur et à mesure de la situation, et je trouvais que ce que j’avais écrit n’avait pas de sens, ce n’était pas évident. 

 

Biche : Interview

 

Vous avez joué dans d’autres groupes avant Biche ? 

Personnellement non, mais les autres oui. Par exemple Brice le deuxième guitariste était dans un autre groupe qui s’appelait A Rainmaker en 2010, puis avec Basile Di Manksi en 2015, et enfin avec Nouvelle Frontière en 2016, et en ce moment, il travaille sur son projet perso qui sortira l’année prochaine !
Mais oui, ils ont tous été dans des groupes, ils sont tous de Paris, à part moi qui suis dans le 78, et c’est vrai que c’est plus simple.

 

Et du coup, en parallèle, vous jouez dans d’autres groupes ? 

Yes, tout le monde joue dans d’autres groupes à côté. Il faut savoir que Carol, notre batteur du début, qui a enregistré sur La nuit des Perséides, a arrêté Biche car il joue maintenant dans Catastrophe.

Thomas, le bassiste, a aussi son groupe qui s’appelle Thomas Subiranin (son nom en somme) ! Il fait de la musique de façon un peu cachée, il sort des choses de temps en temps, mais pour moi c’est le plus gros pop-songwriter actuel.

Alexis Croisé à un groupe qui s’appelle Mottomoda avec le tout premier bassiste de Biche. Mais ce n’est pas tout, il commence à faire de la musique pour des courts métrages également. Enfin Florian, notre nouveau batteur, est initialement le batteur de Satellite Jockey, Sierra Manhattan, et KCIDY, toute cette clique de Lyon en fait.

 

Vous aimez faire participer d’autres artistes ?

Oui, on adore ! Pour le prochain album, j’ai commencé à inviter pas mal de monde, et pas seulement des chanteurs, je veux que ce soit le plus ouvert possible. On essaye de travailler les arrangements, d’épurer un peu ce que l’on fait en interne, pour pouvoir inviter telle ou telle personne/instrument. On a eu la chance avant le confinement de pouvoir jouer à la Maroquinerie sous une forme un peu différente, on avait un ensemble de trois cordes, une flûte traversière, et Fuzati est monté sur scène avec nous. J’ai énormément aimé cette expérience-là. Elle m’a aussi beaucoup ouvert les yeux sur le fait que c’est vraiment cool de faire participer d’autres personnes. Notamment en live, c’est magique !

 

Quel est votre rapport à l’art en général ? Est-ce d’autres arts vous inspirent comme les arts plastiques ou le cinéma ?

Oui, je pense que tout le monde s’intéresse à l’art sous toutes ses formes mais indépendamment les uns des autres. Il y a des gros amoureux du cinéma dans le groupe. Notre premier bassiste, par exemple, est parti pour faire du tatouage.
On a tous ce rapport pluridisciplinaire à l’art on va dire, tout le monde est passionné par plein de choses. 

 

Vos clips sont très esthétiques, aidez-vous à leur réalisation ? Comment s’organise leur réalisation ?

Pour les clips c’est les Enfants Sauvages qui les ont réalisés. Derrière les Enfants Sauvages il y a d’ailleurs Alexis Croisé (le claviériste de Biche) et Eddie Blanchard. Ils nous ont fait des propositions de D.A fortes, très Pop en suivant leur propre interprétation qu’ils avaient des morceaux. On a donc eu beaucoup de chance car ils nous ont réalisé deux clips géniaux je trouve. 

Je pense que c’était bien que toutes les personnes du groupe ne soient pas dans le contrôle absolu de la réalisation des clips, et de ce que Alexis et Eddie faisaient à ce moment-là. Mais bien sûr qu’on aidait à la réalisation vu le peu de moyen à notre disposition pour les faire.

 

Biche : Interview

 

Est-ce que vous pouvez me raconter votre meilleur souvenir sur scène ?

Je dirais la Maroquinerie ! C’était incroyable de pouvoir jouer avec des cordes. C’était super intense, alors qu’on a paradoxalement joué beaucoup moins fort que pour d’autres concerts. Mais les cordes ça rajoute tellement de force dans les harmonies, j’ai trouvé ça vraiment puissant ! 

 

Vous avez joué à Rock en Seine en 2019, c’était comment de participer à ce type de festival ?

C’était cool, oui ! On jouait une demi-heure, mais on a adoré parce qu’on a eu un créneau idéal. On a joué juste avant The Cure et les gens se rendant vers leur concert passaient inévitablement devant notre chapiteau. Donc on a commencé il n’y avait pas beaucoup de monde, mais à la fin c’était archi plein ! Et comme on a fait un set plutôt raccourci, on s’est permit de faire des morceaux et des phases plutôt intenses.

Par contre, les gens circulent beaucoup en festival, donc ce ne sont pas les meilleures conditions selon moi. C’était un concert assez fort, mais je préfère l’expérience en salle de concert, pour l’intimité que ça crée, pour la qualité du son aussi, je trouve ça vraiment mieux ! 

 

Qu’est-ce que tu penses de la scène pop rock actuelle ?

Pas grand-chose ! Parfois j’ai l’impression que ça ne veut plus rien dire, je ne sais même pas si je suis dans un groupe “pop rock” justement, tous les genres se sont tellement mélangés.

En tout cas, je pense qu’aujourd’hui, il y a d’énormes possibilités. Tout le monde peut faire de la musique. C’est-à-dire n’importe qui peut s’enregistrer chez soi, en tous cas plus facilement. C’est plus dans ce genre de musique et de production que je trouve mon compte en général ! Les groupes archi-produits, les productions de Pop française notamment, ça ne m’emballe pas vraiment. Je préfère en général les disques un peu aliens, plus personnels, plus singuliers. C’est des personnes au fond de leur chambre, qui tirent sur des bandes, qui enregistrent sur des lecteurs cassettes dans l’instant, qui font des trucs vraiment sympa ! Il y a plein de petits génies qui sont planqués, et qui font des choses extraordinaires, de la musique pour eux. C’est pour ça que j’ai du mal à te parler de la scène Pop Rock. J’ai clairement moins tendance à écouter du Clara Luciani qui je crois incarne assez bien ce son “pop rock” à la française.

 

Quels sont tes morceaux favoris du moment ?

J’en écoute pas mal (rires) ! Je suis toujours à fond sur Chris Cohen depuis des années, le dernier album est juste incroyable !

D’autre part, j’écoute pas mal Crack Cloud, je suis tombé sous le charme de leurs lives. Sinon pas mal d’artistes un peu plus planqués, dont je dois noter le nom quelque part pour m’en souvenir.

En France par contre mon idole c’est Gaétan Nonchalant qui arrive à faire de la chanson populaire tout en mixant ça avec quelque chose de profondément contemporain et moderne, parce qu’il dose tout superbement bien. En plus de ça, c’est une des plus belles personnes que je connaisse !

 

Avec qui aimerais-tu collaborer ?

Justement, j’adorerai faire un truc avec Gaétan un de ces jours. J’aimerai aussi beaucoup collaborer avec Joaquim et Juliette qui font partie du groupe Pearl & The Oysters. Dans un autre registre Luca Mariani aka Domingo Mariani avec qui je passe pas mal de temps en studio ces temps-ci. Toutes des personnes ultra-talentueuses en tout cas !