Bull : Interview

Bull, c’est un peu cette petite bulle d’air frais dont on a du mal à se passer, le genre de musique entraînante, difficile à décrire tellement elle semble couler de source.
Depuis 2017, le quatuor de York compose des morceaux sur ce qui rythme son quotidien dans je cite « la plus petite ville du monde ». Entre pop et rock, le tout est surtout très instinctif et aborde des sujets forts intéressants mais sans jamais se prendre au sérieux.

Bull présente aujourd’hui son premier EP Love Goo, on ne pouvait pas passer à côté.

 

Bull : Interview
© Mikael Åstrand

 

Comment vous êtes vous rencontrés ?

Je suis Tom, le chanteur de Bull, j’ai rencontré Dan le guitariste du groupe, par le biais de ma copine, qui est sa soeur. On s’est rencontré quand il avait 13 ans, sa voix n’avait pas encore muée. Il y avait une énergie créative entre ses potes et lui ; ils avaient soif d’apprendre les règles du rock. Étant son aîné, je lui ai transmis ma sagesse (rires). On joue ensemble dans Bull depuis 2011.
En 2017, il me semble, Kai et Tom ont rejoint le groupe. Dan a toujours connu Kai, car ils étaient à l’école ensemble.
Nous avons tous baigné dans la même scène rock à York et on était bons potes, donc c’était logique qu’ils rejoignent le groupe.

 

Quelle est l’histoire derrière « Bull » ?

J’aimerais qu’il y en ait une ! On s’est juste dit que c’était un bon nom. C’est notre ami Liam qui a proposé Bull. Je crois que le nom a fait l’unanimité en voiture avec ma mère. S’il faut que je trouve un sens, je pourrais aussi dire que j’ai été dans de nombreux groupes auparavant, et que j’ai toujours trouvé que les gens se prenaient tous trop au sérieux et oubliaient de se marrer. Bull c’était une blague, un endroit où déconner – c’était du “Bull shit” mais qui en a quelque chose à foutre ?

 

Vous avez tous joué dans des groupes avant Bull ?

Oui, Kai est bassiste professionnel, il joue de la contre basse avec son groupe Hyde Family Jam, ils jouent dans la rue.
Quand je l’ai rencontré, il était bassiste pour the Littlemores, le meilleur groupe de York. Il y avait aussi Conor Hirons des Howl and the Hum, qui composait leurs chansons. J’adorais aller voir le groupe jouer, et j’ai grandi en le faisant, comme Dan.
Notre batteur Tom Gabbatiss a joué de la basse dans Asio’s Eyes, un des deux groupes hippies de York, l’autre étant La Petite Mort. Nous avons formé
une coalition rock avec ces hippies et la guerre s’est tout simplement arrêtée. Tom a aussi été batteur dans des groupes chelous comme Ziz, Gynoug, Psycle, et a parfois accompagné Owl aka Mr Oli Knight. Mais il a vraiment commencé comme batteur dans le Kaleidafunk, c’est-à-dire le monde funk de York, maintenant connu.

Cela nous amène doucement à comment j’ai commencé la musique : en jouant du trombone dans le groupe funk rival, Hot Fudge.
J’ai aussi fait de la guitare dans un groupe
cèilidh (musique folk irlandaise) quand j’étais très jeune, et j’ai joué du synthé/clavier et de la batterie dans quelques groupes. Ceci étant dit, Bull a été mon premier (et dernier) groupe en tant que compositeur.

Dan, lui, a joué avant Bull dans le groupe Uncle, avec ses meilleurs potes. Je dirais que c’était un nouveau genre de quatuor Blues/Barbershop. Hilarant et génial. Il joue aussi de la guitare dans Middle Child, avec le premier bassiste de Bull, Rory Welbrock. Ils sont incroyables, écoutez leurs chansons.

 

Est-ce que vous avez des projets en parallèle ?

Moi, pas vraiment, Bull c’est vraiment là où je fais de la musique ! Je joue quelques fois avec We are Hannah de York, accompagnant, avec Kai, à la contre basse, les chansons et harmonies géniales du groupe. Je joue parfois de la batterie dans le groupe de mon frère “Eugene Gorgeous”.
Tom joue avec ses potes et comme je l’ai mentionné, Kai joue dans Hyde Family Jam. Il joue aussi de la contre basse dans Washing Machin Repair et Dead Drummer.
Dan joue dans Middle Child, parfois avec Bonnie Milnes, et il fait aussi partie du groupe d’Amsterdam Personal Trainer. 

 

Bull : Interview
© Bibian Bingen

 

Vous collaborez avec de nombreux artistes pour vos visuels et vos pochettes, quel est votre rapport à la création artistique ?

Nous aimons bosser en collaboration, et voir une idée prendre forme.
Kai a étudié l’art à Leeds donc c’est un atout fort pour le groupe, il nous fait nos posters et tee shirts sérigraphiés.
J’ai aussi la chance de connaitre ma soeur Holly Beer (rires), qui depuis le début, nous aide avec nos visuels. Rory nous aidait beaucoup aussi. On est tous intéressés par l’art, le fait de créer des choses, et le manque d’idées n’est pas le problème : Tom G fait des collages et des peintures, Dan a un grand sens du détail. Je peux vous faire un joli dessin. Nous aimons l’art. 

 

Les dessins ou les animations sont souvent assez brutes, à l’image de votre musique, hyper naturelle et instinctive. Il y a un lien entre tout ça ?

L’instinct est la clef : juste faire ce qui nous vient naturellement. Quand nous demandons à quelqu’un de travailler avec nous, ou que nous pensons à une idée, c’est souvent parce que ça coule de source. Et plus on établit des connections de ce genre, plus on se rend compte que beaucoup d’autres apparaissent. On essaie de faire le plus de choses possible et comme je l’ai dit plus tôt, toujours en se marrant.

 

Bull : Interview

 

Vous avez récemment signés chez EMI et Young Thugs. Qu’est ce que ça a changé pour vous ?

On a plus de réunions Zoom. Si on a une idée, on peut la réaliser. Et il y a une équipe de personnes qui mettront tout en place pour que cela se produise. On est probablement les personnes les plus chanceuses du monde…

 

Young Thugs est un label de York, c’était important pour vous de garder une connexion avec la ville ?

C’était important parce que tout cela ne nous serait jamais arrivé sans eux. Le travail qu’ils ont fait entre 2016 et 2020, de promotion et de publicité, pour la scène déjà existante de York a finalement marché ! C’est grâce à eux, et sans Dave Greenbrown et Young Thugs, nous ne serions pas dans cette position très privilégiée. Donc merci ! La scène de York est aussi, bien sûr, très importante pour nous. 

 

Justement, comment est la scène musicale à York ?

C’est merveilleux, Joe Coates, le seul et l’unique, a organisé des milliers de concerts géniaux à York, tout simplement parce qu’il est hyper cool. Il travaille maintenant au Crescent, qui est une salle de concert dont on est fiers à York.

Il y a tellement de choses à dire sur York et la musique… La scène musicale, et surtout la machine, n’ont jamais été aussi bien huilées. Pour la première fois depuis que je joue des concerts dans cette ville, il y a, je crois, un véritable écosystème et je le répète, une machine, pour les groupes, les tourneurs et les salles. C’est génial de voir ça, j’ai presque l’impression d’être en Europe (milk and honey) (Ndlr : expression voulant dire utopie). Chris Sherrington au Fulford Arms, Harkirit Bopari au Crescent, the Victoria Vaults… ils s’occupent de tout et honnêtement, c’est nickel !

Il y a énormément de groupes : Cowgirl, Perspex, The Howl and the Hum, We are Hannah, Mark Wynn, And The Hangnails, Bonnie Milnes, Rory Welbrock, 7 hour darkness invasion, Parker Lee, Epilogues, Man Screams, Redfern, Pat Butcher, Truman, Avalanche Party, Faux Pas, David Ward McClean… Et avec tous ces confinements, il y en aura surement un million de plus dans la plus petite ville du monde s’appelant York.

 

Votre musique fait penser à des groupes comme Scott & Charlene’s Wedding. Quelles sont vos influences ?

J’adore Scott and Charlene’s Wedding, donc merci. Ils ont joué à York, au mythique Woolpack, où tout le monde joue, tous les soirs ! Sinon, dans mes influences, il y a Bob Dylan, Malkmus et Elliot Smith pour les compositeurs. Musicalement, j’aime vraiment vraiment beaucoup la musique pop, de tout mon coeur. En gros, tout ce qui te donne envie de te lever.
Dan est influencé par le jeu de guitare de J Mascis, le roi des champignons gnomes de la boue. Bien sûr je ne parlerais pas pour les autres mais on aime écouter les mêmes morceaux, quand on est sur la route, tu sais, les trucs vraiment bons.

 

Vous venez de sortir le single Love Goo, quest ce que vous pouvez nous dire sur ce morceau ?

C’est un morceau que j’ai écrit et qui parle du fait de ne pas se prendre au sérieux.

 

 

Le 16 décembre vous avez prévu un live stream, le Snow Global Tour, en quoi ça consiste ?

En effet ! En réalité, c’était l’option la plus raisonnable. Quand l’opportunité s’est présentée sous la forme de Ben Hammond et Reel Recording studio à York, on a trouvé que c’était une idée très cool. Ça pourrait être une chance pour que les gens prouvent leur amour pour Bull. Notre job, c’est de montrer qu’on mérite cet amour.

 

Vous allez aussi vendre du merch. On a récemment vu des artistes, comme Dua Lipa, vendre des tickets qui comprenaient l’entrée et du merch pour leurs live streams. Est-ce une nouvelle façon de rémunérer les artistes ?

Dua Lipa déchire. Et oui ! On a vite compris que personne ne voulait vraiment payer pour un concert sur ordi ou portable. Mais si tu rajoutes du merch, tout le monde y gagne non ?
Et puis comme je l’ai mentionné, nous sommes bénis par le talent en sérigraphie de Kai, on ne peut donc pas échouer !

 

Ce live stream est une façon de promouvoir votre nouvelle sortie. Quelles conséquences le Covid a eu sur la sortie de votre EP ?

Traditionnellement, faire des concerts c’est la façon la plus logique de vendre du merch et de répandre “the sweet word of rock music”. Le covid, ça veut dire qu’on ne peut plus atteindre tout le monde, ce qui a toujours été un de nos principal objectif rock. On espère que d’une certaine manière, le live stream va pouvoir combler ce vide, mais quand notre album sortira, on devra tourner ou redoubler de créativité.

 

Quels sont vos projets pour la suite ? Et quel avenir imaginez-vous pour Bull ?

On a beaucoup de projets. En premier, sortir notre album en début d’année. On espère tourner, pour pouvoir l’emmener dans votre (oui VOTRE) ville. Après ça, on a deux albums prêts pour la scène. On aimerait tourner bien sûr. Sortez ce vaccin magique. On a des plans excellents qui se réaliseront ou pas (ils se réaliseront).
Et on va continuer à faire de la musique et de l’art avec nos amis.

 

Les concerts nous manquent aussi beaucoup, vous avez une anecdote à nous raconter ?

La dernière fois qu’on a joué à Amsterdam, on a garé notre van dans un parking en face des résidences universitaires dans lesquelles on jouait (Dorm Sessions Amsterdam). Un parking très classique mais le sol était couvert de sable. Le van est resté bloqué – vraiment bloqué. C’était de pire en pire… Mais avec l’aide de beaucoup d’étudiants de l’université d’Amsterdam (et de l’asso jardinage), on a creusé pour nous en sortir et on a pu vivre pour jouer un jour de plus.