Goat Girl libère les sens avec son premier album

Le 6 avril est sorti le très attendu album éponyme de Goat Girl. Un album très attendu par les nombreux fans fascinés qui se bousculaient – littéralement – aux concerts ou les curieux d’Internet qui tombaient sur les démos du groupe, de Slowly Reclines à The Man with No Heart or Brain.

 

Goat Girl libère les sens avec son premier album
Goat Girl – © Holly Whitaker – De gauche à droite : L.E.D, Rosy Bones, Clottie Cream, Naima Jelly

Car depuis 2016 et la sortie des singles Scum et Country Sleaze, le groupe enchaîne les tournées, révélant par-ci par-là les premiers arrangements de nouveaux morceaux, et créant la sensation.
Trop vite classées dans les catégories indie rock, garage band et on en passe, les jeunes artistes dévoilent un disque aux allures d’album-concept, mais qui prend plutôt la forme d’un laboratoire d’idées quitte à s’éloigner complètement de ce qu’on leurs connaissait.
Si le rock garage semble être le dénominateur commun de Goat Girl, le groupe a évolué musicalement et les morceaux sont le résultat de cette mixité d’influences. Prenons l’intro et les interlude : Salty Sounds, A Swamp Dog’s Tale ou encore Hank’s Theme rythment l’album et s’apparentent au travail de Micachu.

L’évolution s’était déjà pressentie avec les derniers singles, qui étendaient le panel musical du groupe avec l’arrivée de synthés ou de violons.
Voilà qui expliquerait donc le laps de temps écoulé entre la sortie du premier single et celle de l’album. Mais au studio, on les imagine surtout très productives (l’album ne compte pas moins de 19 chansons, pour la plupart inédites) et tatillonnes, alertes du moindre détail, explorant encore et encore les sonorités de chaque morceau. Il n’y a qu’à entendre le nouvel arrangement de Country Sleaze.

Plutôt que de se définir en termes de genres, Clottie révélait récemment que le groupe se représente à travers des mots comme : « marécageux, dissonant, cirque ».  Un mélange certes étonnant mais qui fait sens à l’écoute des titres Cracker Drool ou The Man with No Heart or Brain.

 

Goat Girl libère les sens avec son premier album
Cover de l’album ‘Goat Girl’

 

La cover de l’album est signée Miguel Casarrubios. Explosion de couleurs, elle est à la fois hypnotisante et menaçante. Comme les morceaux ; noirs, affirmés et intenses, débordant parfois d’énergie comme The Man, ou évoluant sous pression comme Slowly Reclines et Creep. Du rock au punk et à la pop, tout y passe. La maîtrise de leur travail est complète, contrastant avec les lives où elles n’ont pas forcément le même contrôle, et où l’aspect « dissonant » de l’ensemble transparaît davantage.

Admirablement produites par Dan Carey (Franz Ferdinand, Pumarosa…), les 19 chansons dépassent rarement les trois minutes. Et plus que du je m’en foutisme (autre case dans laquelle on a voulu les coincer), on y mesure la préciosité de chaque détail. Rosy le disait récemment, « tu peux toujours ajouter des trucs aux morceaux, mais ça ne les rendra pas nécessairement meilleurs ».

Les textes sont brillamment écrits et souvent paraissent être l’élément autour duquel le morceau se construit. Les thèmes abordés vont de la confusion, au dépassement jusqu’au désespoir et sont souvent sarcastiques, comme les deux parties de I Don’t Care ou Viper Fish :

Moonlight gleaming, viperfish screaming, dawn is nearly here
Phallic building, cyanide killings, all that was clear
Find an antidote for this accumulating smoke
(Viper Fish)

Mais le groupe ne se cantonne pas dans l’humour noir. Clottie, qui écrit majoritairement, parle aussi « à travers les yeux d’une petite fille ou d’un alien qui ne comprend pas vraiment le monde autour de lui ». « L’album parle aussi d’expériences ; du fait de ne pas être capable d’agir comme on l’aurait espéré et de se créer alors une nouvelle réalité tout en s’autorisant à imaginer cette version de l’histoire comme l’unique ».

L’album s’achève en douceur avec le magnifique Tomorrow – cynique, mais idéaliste et toujours affirmé. ‘Goat Girl’ est le résultat bienheureux d’un fourmillement d’idées et une véritable libération des sens.